Le post du jour m'a été inspiré par un coup de gueule maternel suite à la brève intervention de l'écrivain franco-belge au journal de France 2 hier (3ème lien ci-dessus) qui a tenu quelques paroles peu amènes pour les personnes âgées ( "aujourd'hui on a choisi les vieux plutôt que les jeunes").
J'ai tout de suite fait la relation avec le lien publié par mon ami Sapiens sur le forum, relatif à l'intervention du philosophe André Comte-Sponville ( https://www.franceinter.fr/idees/le-coup-de-gueule-du-philosophe-andre-comte-sponville-sur-l-apres-confinement) qui a pu dégainer sur les ondes quelques phrases prêtant à réflexion mais surtout à caution (selon moi) :
" En quoi les 14 000 morts du Covid-19 sont-ils plus graves que les 150 000 morts du cancer ? Pourquoi devrais-je porter le deuil exclusivement des morts du coronavirus, dont la moyenne d'âge est de 81 ans ? Rappelons quand même que 95 % des morts du Covid-19 ont plus de 60 ans."
"Mais les vies qu'on sauve, ce sont essentiellement des vies de gens qui ont plus de 65 ans. Nos dettes, ce sont nos enfants qui vont les payer."
" Et je me demande ce que c'est que cette société qui est en train de faire de ses vieux la priorité des priorités. Bien sûr que la dépendance est un problème majeur, mais nos écoles, nos banlieues, le chômage des jeunes, sont des problèmes, à mon avis encore plus grave que le coronavirus,de même que le réchauffement climatique, la planète que nous allons laisser à nos enfants."
J'ai pu réagir sur le forum à la vision développée par ce philosophe, qui conduit selon moi à ostraciser les personnes âgées en les rendant en quelque sorte responsables de la casse économique accompagnant la crise sanitaire.
Bien entendu j'ai compris l'idée de fond de mon ami Sapiens qui était de mettre en exergue le risque d'aller vers une société "pan-médicaliste" où la santé deviendrait la valeur suprême de notre existence alors qu'elle doit rester un moyen pour contribuer à notre bonheur.
En d'autres termes, c'est l'idée qu'aujourd'hui notre société n'accepte plus la mort (qui fait pourtant partie de la vie) et qu'elle cherche sans cesse à repousser les limites naturelles.
Mais, pour moi, nous ne sommes absolument pas dans ce registre avec le COVID 19. Outre son origine due à l'action inappropriée de l'homme, cette pandémie est actuellement ingérable et est susceptible de toucher tout le monde, pas seulement les personnes âgées !
Il n'est pas question ici de vouloir rallonger l'espérance de vie de nos anciens, mais plutôt d'épargner des vies dont celles de nos parents, grand-parents qui ont encore de nombreuses choses à vivre avant de partir définitivement.
Lorsque je répondais à Sapiens, je me suis aperçu, que ce que je dénonçais au travers des propos du philosophe, s'appelait l'âgisme, c'est à dire une forme de discrimination, de ségrégation, de mépris fondés sur l'âge.
Je vous ai posté deux liens en début de cet écrit qui renvoient à des tribunes publiées ces derniers jours par nombre de chercheurs pour dénoncer ces discours anti-vieux qui ne cessent d'alimenter les réseaux sociaux.
Dans la perspective d'un nouveau modèle de développement, comment cautionner une telle vision totalement dépourvue des notions d'altérité et de solidarité ?
L'égoïsme humain est-il une fatalité ? La crise doit-elle toujours être un catalyseur d'opposition entre les groupes ? Faut-il absolument toujours chercher un bouc-émissaire pour expier nos mots ?
Non, nous sommes tous responsables de ce qui arrive aujourd'hui et les personnes âgées ne sont pas la cause des faillites à répétition, du chômage des jeunes et des perspectives peu reluisantes qui les attendent..c'est notre modèle de développement qui est l'origine de ce désastre, c'est notre modèle de développement qui ne veut pas mourir et qui cherche actuellement des victimes expiatoires.
Alors, changeons-le ce système qui cherche à opposer les générations et à faire croire que les vieux sont des entraves à notre liberté, à cause du coût des retraites, du coût de la dépendance et de la santé.
Une société qui ne respecte pas ses aînés est une société sans sagesse, une société qui assimile l'individu à un simple produit périssable.
Car ces vieux que l'on stigmatise, ce sont nos parents, nos grand-parents, ceux qui nous ont nourri, ceux qui s'occupent d'aller chercher les gamins à la sortie des classes, ceux qui les gardent certains jours ou pendant les vacances, ceux qui paient leur Noël ou leurs séjours d'été. Ils ont une valeur sentimentale mais aussi une utilité sociale que l'on a souvent tendance à oublier.
Et c'est au prix de cette mémoire courte qu'on voudrait finalement les sacrifier aujourd'hui comme si ce sacrifice pouvait rendre service aux jeunes ?
Non, soyons sérieux, dans un modèle de développement solidaire, nous avons le devoir de nous en occuper du mieux possible et d'accompagner dignement leur fin de vie.
Les personnes âgées ne sont pas simplement une donnée statistique, et j'ai du mal à encaisser les réflexions qui prolifèrent sur les réseaux sociaux et relativisent le nombre de morts en soulignant que la majorité actuelle provient des EHPAD.
Halte à la propagation du virus "anti-vieux" !
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