C'est la conclusion incroyable du président du MEDEF dans une interview donnée au Figaro...
Là où on attendait un changement de ton dans la communication du patron des patrons, compte tenu de la crise et de l'augmentation hallucinante de la fracture sociale qu'elle implique, on a eu droit à un rappel des "fondamentaux" comme diraient les rugbymen :
"soutien étatique aux investissements des entreprises, baisse des impôts de production, augmentation du temps de travail, réduction des congés..."
Les journalistes écrivent qu'il s'est caricaturé tout seul !
Ayant adopté comme ligne de conduite de me départir de toute réflexion idéologique ou politique (même si l'exercice peut paraître impossible), je vais me servir de cette position de Monsieur Roux de Bézieux pour progresser dans notre réflexion sur le modèle de développement de l'après-Covid.
Nous avons-là encore un exemple de personnes qui veulent continuer sur le schéma socio-économique avant crise et qui entendent rattraper le retard pris par l'arrêt de l'économie le plus vite possible et peu importent les moyens.
Mais, comment est-il envisageable qu'un homme aussi haut placé, aussi expérimenté et aussi avisé intellectuellement soit à ce point aveugle pour ne pas voir que le retour "à avant" n'est pas possible.
Le confinement va encore durer plusieurs semaines faute de production suffisante de masques et vu le temps nécessaire à établir une stratégie opérationnelle efficace à base de dépistage et tracking pour échapper à la deuxième vague du virus.
Le gouffre financier, les pertes, l'ampleur de la dette vont prendre des proportions vertigineuses qui ne seront pas rattrapables sauf à disposer d'une armée d'esclaves travaillant 100 heures par semaine ! La réalité c'est celle-là et il faut malheureusement faire avec.
Par conséquent, on ne peut pas revenir à la situation préexistante à la crise, on n'en a plus moyens, à tout le moins en France.
Je ne suis pas économiste, mais avec mon regard de néophyte, je me dis que la bulle spéculative (pour reprendre l'expression d'usage), cette économie plus fictive que réelle, basée sur des estimations incessantes (taux de croissance, indices en tous genres, flux boursiers...) n'est plus viable.
Fini le temps de la prévision, voici le temps de l'imprévision..ou du moins de l'imprévisibilité !
On n'est dans l'incapacité de prévoir quoique ce soit pour le moment et de projeter à moyen terme, tant que l'on n'a pas trouvé un vaccin contre ce virus.
Productivité et compétitivité sont deux notions qu'il faut pour le moment mettre en retrait car elles n'ont plus de sens actuellement. Nous sommes passés dans une économie de survie où l'urgence va être d'empêcher les naufragés sociaux actuels de se noyer définitivement, et de maintenir à la surface les nouveaux naufragés sociaux du COVID 19.
On s'entête à sauver la vie des gens atteints gravement par le virus, on est tous solidaires derrière nos soignants et nos "invisibles" qui permettent aux privilégiés dont je suis de continuer à jouir de l'existence quoique confiné.
On doit s'entêter de la même façon à sauver la vie de ceux qui n'ont pas d'abris, des 10 millions de français qui vivent en dessous du seuil de pauvreté et meurent plus vite que les autres, des victimes de la crise économique que nous traversons depuis des années et des victimes de la crise COVID. Sinon, nos discours, nos applaudissements pour les soignants, nos rassemblements Charlie et autres manifestations fraternelles qui sont autant d'hymnes à la vie n'auraient plus de sens ! Crise sanitaire et crise sociale doivent recevoir le même traitement d'urgence.
Alors, de manière pragmatique, quelles mesures à mettre en place et qui dans mon esprit sont censées assurer la transition vers un nouveau modèle de développement ?
1) un revenu de base universel pour les plus pauvres : je sais, c'était il y a 3 ans la proposition de Benoît Hamon mais tant pis, j'ai la conviction qu'on ne peut pas y échapper, en tous les cas pas dans la perspective d'un nouveau modèle basé sur des valeurs humanistes
On doit poursuivre notre action de solidarité et permettre aux plus défavorisés de manger et nourrir leur famille
2) la remise à plat de tous les salaires en France comme je le mentionnais déjà dans mon texte fondateur du blog avec la réévaluation rapide dans un premier temps des plus bas salaires de tous les précaires qui vont subir de plein fouet les conséquences économiques et sociales de la crise sanitaire.
3) cette solidarité doit être en priorité et en plus grande partie financée par les plus riches de notre pays : aucune démagogie, aucune caricature lénino-mélanchoniste, juste du pragmatisme et l'application des principes de réalité et d'égalité. A court terme, il existe de l'argent mobilisable chez les grandes fortunes de notre pays, chez les grands groupes industriels et commerciaux qui ont dégagé des marges exceptionnelles depuis plusieurs années. Il conviendrait par exemple de mettre en place provisoirement un impôt exceptionnel sur les sociétés CAC 40, GAFA..., de restaurer l'ISF et modifier de l'impôt sur le revenus des plus hauts salaires. "Les invisibles" dotés des plus bas salaires sont au front, ont pris les risques jusqu'à présent, aux "invisibles du haut" de prendre le relais et de faire tenir bon notre société. Bien entendu tout le monde devra payer des impôts mais l'essentiel vu l'urgence est de mobiliser le maximum de ressources financières là où elles existent réellement.
4) banques et assurances doivent participer également à cet effort collectif avec l'interdiction de compenser ces concessions financières par une hausse des taux d'intérêts ou des cotisations pour leurs clients.
5) la détermination d'une liste de biens essentiels dont la production doit impérativement être concentrée en France afin de ne plus être dans une situation de dépendance vis à vis d'autres pays en cas de crise
6) la possibilité pour les entreprises en faillites de reconvertir leur production vers un des produits de la liste établie évoquée ci-avant, avec aides étatiques soumises à la mise en place d'appareils et de procédés de fabrications respectueux de normes environnementales strictes
J'arrête là pour l'instant, discours présidentiel oblige, en espérant que vous pourrez compléter par vos idées mon propos, afin de ne pas revenir à l'activité normale souhaitée par le président du MEDEF mais d'aller plutôt vers une activité inédite.
Je partage les propositions énoncées. Sur la question de revenu universel, par définition, il s’applique à toutes et tous et pas seulement aux plus pauvres d’entre nous.
Et encore, le MEDEF sont des tendres à côté de l'AFEP et de Laurent Burelle, son dirigeant :
https://www.nouvelobs.com/economie/20200406.OBS27146/laurent-burelle-le-patron-des-grands-patrons-qui-prend-le-chomage-partiel-et-garde-ses-dividendes.html
Pour ma part, même si cela paraît idéaliste, j'irai jusqu'à préconiser la taxation du capital à la hauteur de celle du travail et le plafonnement de la richesse individuelle. Certaines études fixent même le montant d'un "salaire du bonheur" :
https://www.huffingtonpost.fr/2018/02/15/pour-etre-heureux-il-faudrait-gagner-beaucoup-dargent-mais-pas-trop-quand-meme_a_23362317/